13.5.12

HISTORIQUE #2

 Le château suisse est resté à l'état de passoire pendant bien longtemps

C’est dans les rayons de soleil apportés par le mois de février 2012 que je retrouvai une certaine énergie à dépenser dans ce projet. Pendant six mois il avait plu, grêlé et neigé sur (et dans) mon Château Suisse qui n’avait pas fière allure. Les dégâts, pourtant, étaient moins dramatiques que prévu. Juste quelques traces d’humidité pas vraiment inquiétantes, un peu de moisi par-ci par-là. Je découpai des fenêtres, y posai des carreaux en plexiglas jointés au mastic de maçonnerie (le moins cher). Si ceux-ci s’abîmaient, il suffirait d’un pistolet et d’une de ces bombes de silicones pour en assurer l’entretien. Je troquai les recettes expérimentales et non convaincantes d’enduit chaux-sable-résine dans l’achat d’une bâche en polyéthylène tressé de 96m2 et de vingt litres de colle à isolant extérieur. Une solution draconienne très « red neck », mais qui allait me satisfaire plus que je ne le pensais : après avoir découpé des modules à languettes calculés spécifiquement, je collai, pliai et agrafai cette bâche sur ma cabane. Après quatre jours consacrés à ce labeur, j’avais devant moi quelque chose de plus juste qu’auparavant. Ma coquille était devenue une toile de tente en dur dont les volumes étaient préservés, dont la couleur bleue électrique vibrait réellement en contraste dans son environnement, et dérangeait les spectateurs. Je jubile encore lorsqu’on me demande si c’est « définitif ». Et par-dessus tout, j’avais retrouvé le sentiment primal de la victoire de l’homme sur les éléments. La pluie et le vent n’étaient plus une source d’inquiétude ; ma coquille, cette partie si infime de ce que mon travail devait représenter, était achevée.

 Le collage de la bâche - très difficile de maroufler proprement

Plein d’entrain, j’attaquai l’intérieur comme une partie de plaisir. Mais avant cela, il me faut raconter ce qui s’est passé. Du moins, ce que j’ai pu déduire des indices laissés sur place. Le 3 avril, en arrivant près de ma cabane, je constatai que la porte avait été enfoncée. En passant celle-ci je trouvai un lit provisoire au milieu de mes outils, une couette humide et une lampe de poche. A ce moment là la bâche ne couvrait pas entièrement le toit, et pourtant quelqu’un avait trouvé un abri dans mon «château» perméable. La mystérieuse personne avait été galante : elle n’avait rien volé d’autre qu’un peu de place sous mon toit; tout était intact. Et pourtant je ne pouvais pas laisser cela se faire, il fallait que mon abri soit fermé et protégé des voleurs plus sérieux. Je renforçai la porte et sortis la couette et la lampe, qui furent récupérés, je crois. Je suis toujours mal à l’aise lorsque je pense à cela; si mon atelier était sensé tendre vers un idéal, je ne pouvais pas pour autant le partager. Au matin du 7 mai une surprise bien plus désagréable m’attendait: quelqu’un avait frappé à nombreuses reprises sur la porte à l’aide d’un chevron de bois utilisé comme bélier; une des vitres était brisée. La porte avait tenu bon, même si elle était abîmée. Le ou les vandales avaient sûrement voulu ouvrir le verrou en cassant une fenêtre mais j’avais auparavant pris soin de placer celui-ci hors d’accès par l’extérieur. Mes craintes furent confirmées. Il me faudrait réétudier le système d’entrée afin de rendre ma forteresse imprenable. Triste monde.

 L'aspect de ma forteresse en avril 2012 - de plus en plus S.F

Je branchai un câble électrique de 15m depuis l’atelier volume de l’école jusqu’à ma cabane, posai un sol propre en stratifié (son but initial) et me mis à toutes sortes de préparatifs. Selon mes dessins, je devais obtenir 30m2 de placoplâtre à plaquer sur les murs pour obtenir le maximum de luminosité et des cloisons intérieures propres, ainsi que 20m2 de volige de peuplier (la moins chère) destinée au mobilier. Les matériaux se devaient d’être peu nombreux pour garder une cohérence. Avant cela je m’amusai à parfaire dessins et mesures concernant l’agencement du mobilier intérieur, et m’exerçai quelque peu à des essais esthétiques et fonctionnels. Il fallait garder à l’esprit la motivation principale de ce projet, qui était de construire un atelier aussi idéal que possible au sein de l’école. Tout devrait donc être extrêmement fonctionnel. J’avais opté pour un aménagement circulaire collé aux murs, laissant le centre de la pièce libre, me permettant de circuler librement et de prendre du recul. La lumière la plus stable se trouvait contre la face sud-ouest, c’est là que serait ma table à dessin. Celle-ci serait inclinée à environ 15° et prendrait sa base à 73 centimètres du sol pour une chaise de 43cm à l’assise. L’établi s’élèverait à 82cm, me permettant de travailler debout, à gauche de la table à dessin et donc face à l’entrée si j’avais affaire à des longueurs de bois supérieures à 4m50, portes ouvertes en m’aidant d’une desserte à même hauteur. L’évacuation des sciures et poussières présentes au sol se ferait au moyen simple du balai, directement par la porte d’entrée. En face des tables de travail il y aurait des rangements simples pour les outils les plus couramment usagés, centrés à 1m50 du sol. Le reste des outils serait stocké dans la desserte mobile et le papier devrait être stocké dans des contenants hermétiques, le taux d’humidité étant trop important sans isolation. Une banquette pliable (pour éviter la poussière) de 2m20 de long sur 1m de large serait située sur la face est, tête au nord, là où la lumière est la plus intense tout au long de l’après-midi, pour rêvasser au soleil, car il est indispensable de se reposer dans un atelier. Enfin les angles « morts » situés entre les faces nord-est et nord-ouest et la porte seraient consacrés respectivement à l’évier et au stockage de tenues. Des étagères-bibliothèques à casier longeraient la première brisure, de hauteur 27cm et 37cm. Toutes ces mesures ont été établies empiriquement en fonction de ce qui « marchait », selon moi, ou pas, selon ma taille et selon des meubles Muji, Ikea, de Rietvelt ou encore de proportions telles qu’énoncées dans le Modulor du Corbusier. L’éclairage serait fourni par deux lampes de chantier suspendues à la panne faîtière. Un escalier asymétrique serait construit pour faciliter l’accès au « château ». A partir de là, il ne me resterait plus qu’à me servir de cet atelier. Et sans doute à analyser si cette construction avait ou non modifié mon travail dans un sens ou dans l’autre.

1 commentaire:

  1. Bonsoir
    Je ne sais pas si vous l'avez fait exprès ou pas, mais votre soucoupe dans cet état, a des airs de Tardis du Doctor Who, autre véhicule spatial :)
    http://www.lollercoasterlab.com/2011/06/doctor-who-lend-me-your-tardis.html
    En tout cas, bravo, beau boulot !

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